mercredi 27 octobre 2021

Le Mystère Caravage de Peter Dempf

Après nous avoir régalé il y a quatre ans avec Le Mystère Jérôme Bosch, Peter Dempf récidive avec le Caravage cette fois-ci. 

Comment distinguer ce qui est beau, si on ne connaît pas le monstrueux, le disproportionné ? Ce n’est qu’en ajoutant un ver dans une corbeille de pommes qu’on peut ensuite admirer la beauté réelle d’un fruit sain, par comparaison avec la difformité d’un fuit gâté.

Michelangelo Merisi da Caravaggio est un peintre du XVIe-XVIIe siècle, principalement connu encore aujourd’hui pour son génial travail autour de la lumière et de l’obscurité, avec une utilisation du clair-obscur et une forte empreinte réaliste.

Le Caravage peint énormément pour l’Église, mais ses façons de faire ne sont pas aux goûts de tous. Le peintre prend pour modèle des prostituées pour représenter la Vierge, il utilise des cadavres pour peindre ses morts, bref, le petit peuple a une place de choix chez lui, mais les États pontificaux ne voient pas d’un bon oeil ce peintre de génie qui n’en fait qu’à sa tête et cumule les démêlés. 




Le Mystère Caravage est un roman historique comme je les aime, l’auteur s’est saisi de la vie du peintre (du moins de ce que l’on en connait) pour construire sa propre intrigue. Le personnage central de l’apprentie, narratrice du livre n’a pas existé dans la réalité. La création de ce personnage, Nerina, donne l’occasion d’entrer dans l’intimité de l’atelier du peintre et de nous révéler l’état d’esprit du Caravage lorsqu’il peint. 


En s’intéressant aux cinq dernières années de sa vie (1605-1610), Peter Dempf s’appuie sur les divers voyages du Caravage mais aussi sur la façon dont ses toiles ont pu être perçues. Après tout, ils ne sont pas nombreux ceux qui faisaient poser des prostituées pour représenter la vierge, ou des morts pour aller au plus près de la rigidité cadavérique. 


L’auteur s’intéresse aux problèmes qu’a pu vivre le peintre en choisissant justement ce type de modèle. Il questionne l’Eglise en représentant la Vierge sous les traits de son ancienne maîtresse prostituée, telle une vulgaire mendiante. Il se fait évidemment des ennemis. D’ailleurs, le fait que le Caravage avait des protecteurs puissants et qu’il s’est battu en duel et a blessé mortellement son adversaire est avéré. C’est à la suite de ce duel que le peintre s’est trouvé contraint de quitter la Città Eterna pour Naples, Malte ou encore la Sicile.


Les voyages du Caravage ont eu lieu, mais tout le côté traque présent dans le roman est un outil de suspense, un moyen de tenir le lecteur en haleine. 

Avec Le Mystère Caravage, Peter Dempf nous entraine dans l’Italie (et l’Espagne) du 17e siècle, il nous immerge dans la chrétienté et ses vices, il nous fait entrer dans une intrigue politique où le peintre n’est qu’une marionnette, tantôt défendu, tantôt décrié et menacé de mort. 


Le Mystère Caravage est un thriller historique passionnant où l’on découvre les principales toiles du maître et où la technique du peintre est mise à nue pour permettre une pleine compréhension de ses oeuvres. 


Un roman passionnant autant que dérangeant, dans la mesure où l’auteur interroge l’homme se cachant derrière le peintre, le fameux Michelangelo Merisi dont le comportement au sein de sa famille (notamment) demeure discutable - mais sans doute pas véridique ! 


Pour celles et ceux qui aiment les thrillers historiques et la peinture du Caravage ! 



Traduit par Joël Falcoz. 


« Je pourrais peindre ce tableau sans ouvrir les paupières, dit-il au bout d’un moment. Parfois, il me paraît plus réel que la réalité. 

C’est ce que les gens aiment dans tes oeuvres, Michele. La vie qui les habite. Chaque fruit, chaque feuille semble respirer, comme s’ils avaient quitté le monde réel pour s’inviter dans le tien. »





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