dimanche 10 octobre 2021

Au bord de la nuit de Friedo Lampe

Friedo Lampe n’a pas publié au bon moment. 

À la sortie du roman en 1933, Hitler vient d’obtenir les pleins pouvoirs en devenant chancelier. Lampe qui éprouve peu d’interêt pour la politique n’a pas compris le danger ambiant. 

Très vite le roman est retiré des bibliothèques, mais aussi de la vente et l’auteur est affublé d’un beau suspect dans sa fiche. 



L’approche de Lampe est novatrice pour l’époque : il débute Au bord de la nuit en plein milieu, sans donner de background à ses personnages, comme s’ils venaient de tomber du ciel, à quelques détails près. 

La galerie de personnages est éclectique comme les situations qui n’ont, pour la plupart, aucun lien entre elles. 

Il y a le douanier, des enfants, des étudiants attendant de partir pour Amsterdam, un catcheur… Autant de diversité que d’êtres humains, et Friedo Lampe joue à faire se rencontrer certains personnages et pas d’autres. Certains pénètrent la vie des autres pour quelques instants, sans s’éterniser. 


L’aspect décousu du roman est certainement ce qui fait sa force et aussi ce qui a fait de Lampe un écrivain novateur en Allemagne dans les années 1930. 

Mais cette époque est révolue et la lecture de ce titre en 2021 n’a pas la même saveur que lors de sa parution originale. La beauté du livre réside dans sa poésie, dans le lyrisme instillé dans les pages. 

Les airs de flûte côtoie la mort et la transforme. La lumière apparaît et donne l’occasion à des passants de profiter d’un match de catch… 


Le lecteur entre au coeur d’un moment de vie, entre la naissance et la mort, durant des jours sans exceptions où une pointe de tristesse, ou plutôt de mélancolie, se jète la nuit sur la ville de Brême. 


Je conclus sur les mots du traducteur et auteur de l’étude proposé à la suite du roman, Eugène Badoux : « En se proposant de donner à son oeuvre beaucoup d’atmosphère, Lampe témoignait de la plus sûre intuition artistique, car seule une atmosphère définie, intense et soutenue, pouvait triompher de la discontinuité des actions et assurer l’unité du roman. »



- Merci aux éditions Belfond pour l'envoi de ce titre ! 






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