Je sais, j'ai énormément de retard sur mes articles par rapport à mes lectures. J'ai lu Les gens heureux lisent et boivent du café d'Agnès Martin-Lugand il y a plus d'un mois maintenant et heureusement que j'ai pris des notes sur mon ressenti à la fin de ma lecture, sinon, je n'aurais sans doute pas pu vous écrire cet article aujourd'hui.
J'ai reçu ce livre en novembre dernier pour mon anniversaire dans une édition vraiment magnifique puisqu'il s'agit de l'édition limitée Pocket - je tiens d'ailleurs à dire qu'au vu de la beauté du livre comparé à la version classique, Pocket a pris une très bonne décision en l'éditant avec cette nouvelle couverture même si c'est dommage qu'il n'ait pas édité la suite La vie est facile, ne t'inquiète pas dans une édition du même esprit (peut-être pour l'année prochaine ?)
Depuis le temps qu'il me fait de l'oeil ce livre je n'ai pas pu m'en empêcher, il a été ma première lecture parmi tous les livres que l'on m'a offert.
Cela fait maintenant plusieurs semaines/mois que je ne peux plus trop lire, en tout cas pas dans un rythme aussi soutenu qu'auparavant alors j'ai tendance à favoriser les lectures assez courtes comme vous avez pu le voir sur Instagram - bon Temps glaciaires & Sacré sont les exceptions - et pour le coup, ce qui est sûr c'est que Les gens heureux lisent et boivent du café entre parfaitement dans ce critère puisqu'il ne fait même pas 200 pages.
« Ils étaient partis en chahutant. J’avais appris qu’ils faisaient encore les pitres dans la voiture. Je m’étais dit qu’ils étaient morts en riant. Je m’étais dit que j’aurais voulu être avec eux. »
Diane a brusquement perdu son mari et sa fille dans un accident de voiture. Dès lors, tout se fige en elle, à l’exception de son coeur, qui continue de battre. Obstinément. Douloureusement. Inutilement. Égarée dans les limbes du souvenir, elle ne retrouve plus le chemin de l’existence. Afin d’échapper à son entourage qui l’enjoint à reprendre pied, elle décide de s’exiler en Irlande, seule.
Mais, à fuir avec acharnement la vie, elle finit par vous rattraper…
Bon, une fois encore j'ai retrouvé cet éternel débat dû à l'engouement des livres : la médiatisation d'un livre le rend-il moins bon parce que les critères d'appréciation se trouvent être plus élevés que d'ordinaire ?
C'est une question délicate dont la réponse n'est pas la même en fonction du livre en lui-même je trouve, mais aussi en fonction du lecteur.
Pour ma part, c'est vrai que quand j'entends vraiment beaucoup parler d'un livre comme ça a été le cas pour celui-ci, j'ai tendance à mettre la barre très haute et à avoir des attentes relativement importantes. Il m'arrive de regretter l'engouement autour d'un livre ou d'un auteur à cause de cela justement - même si je souhaite aux auteurs d'acquérir une certaine notoriété bien évidemment !
C'est vrai aussi que j'ai tendance à me plonger dans un livre tout en sachant le moins possible de ce qu'il va raconter, de telle sorte que j'évite les résumés ou autre sur les réseaux sociaux, mais on ne peut pas passer à côté de la médiatisation de certains livres - en ce moment, c'est par exemple Chanson douce de Leïla Slimani qui a en plus remporté le prix Goncourt de cette année et qui m'intrigue beaucoup, mais je pense que je vais attendre quelques mois, peut-être pour sa sortie poche ou quoi, mais en tout cas pas maintenant, tout le monde ne fait qu'en parler et je préfère toujours attendre de retrouver le calme d'après la tempête.
Bon bref, tout cela pour dire que ce livre a été vraiment énormément vendu, que beaucoup le considèrent comme un coup de coeur ou en tout cas, une excellente lecture, etc, etc. comme vous l'avez sans doute un peu compris, ça n'a pas vraiment été le cas pour moi.
Je m'explique - avant de me faire égorger par les fans de l'auteure -. L'histoire en elle-même est plutôt intéressante, puisque l'on suit Diane une parisienne qui vit dans le passé ou plus exactement qui ne vit plus réellement. Elle vit en quelque sorte en exilé dans son appartement depuis qu'elle a perdu son mari et sa fille il y a de cela une année. Complètement désemparée, elle ne semble plus savoir comment vivre tout simplement.
Le postulat est tout à fait correct, l'histoire promet d'être riche en émotion. De prime abord j'ai pris le livre pour un mélange entre le drame et le développement personnel comme on en voit beaucoup pullulé depuis des années (comme avec Laurent Gounelle par exemple), mais en fait non, pas vraiment en tout cas.
Bien évidemment tout le roman va tourner autour de Diane, la protagoniste du roman qui est tout aussi énervante qu'épuisante, mais pas tout le temps ! Enfin si, mais c'est surtout que ça fonctionne à l'usure. Au début on comprend pourquoi elle est aussi mal, pourquoi elle se plaint toutes les pages et tout et puis, voilà qu'elle prend la décision de partir en Irlande et on se dit alors : ça y est l'apprentissage de la guérison va commencer, on ne va pas la supporter pendant tout le bouquin dans son appart dégueulasse de Paris.
J'ai vraiment aimé le moment où elle décide de prendre sa vie en main avec ce voyage, de se prouver à elle-même qu'elle en est capable, qu'elle peut le faire seule. Sur certains aspects, je me suis retrouvée dans la psychologie du personnage ce qui n'était pas désagréable, mais sur d'autres j'ai plus eu l'impression d'avoir affaire à une fille de 16 ans qu'à une femme qui, certes a perdu son mari et sa fille, mais qui a quand même des choses auxquelles se raccrocher, comme son meilleur ami Felix ou son café-librairie quoi. Fin je suis désolée, mais c'est un peu capricieux de sa part de tout abandonner comme ça, surtout quand on sait que des gens tueraient pour avoir la chance de faire la même chose, mais bref.
Les gens heureux lisent et boivent du café d'Agnès Martin-Lugand, édition Pocket collector.
Voilà donc que Diane part en Irlande histoire de guérir seule, histoire d'être recluse dans un pays étranger et d'avoir enfin la solitude dont elle a besoin - c'est en tout cas comme ça que je l'ai perçu. À ce moment là, ça allait un peu mieux, je la trouvais un peu moins pitoyable à toujours se plaindre et tout.
Finalement, ça a été de courte durée parce qu'elle repart à la fin du bouquin et alors une grosse interrogation s'est posée : à quoi bon partir ? en quoi ce voyage en Irlande est-il légitime pour l'histoire puisqu'au final, retour à la case départ, Diane revient à Paris et décide de reprendre en main "Les gens", mais ce n'est pas comme s'il n'était pas là avant qu'elle parte, elle n'avait peut-être pas besoin de partir faire ce qu'elle a fait pour s'en rendre compte quoi.
Lors de la dernière page du livre je me suis demandée à quoi ça a servi, à quoi ça l'a avancé de partir en Irlande si ce n'est faire n'importe quoi, si ce n'est briser le coeur du pauvre Edward qui était prêt à sauter le pas pour elle. Définitivement, ça a été une déception parce que le personnage est bien trop creux et pitoyable pour moi.
J'ai surtout eu l'impression que l'auteure voulait mettre le paquet sur le pathos afin de combler certaines lacunes comme le fait de ne peut-être pas réellement savoir ce que cela fait de perdre des êtres aussi proches. Oui, c'est ça, j'ai eu le sentiment que l'auteure n'a peut-être pas suffisamment creusé dans son personnage en tant que telle et l'a surtout utilisé comme généralité.
Je m'explique : Diane = représentation d'une femme qui a perdu sa famille donc elle est la figure de proue de tous ceux qui ont perdu un jour leur conjoint ou un enfant, mais au-delà de cela, où est l'individu en tant que tel ? où se trouve le personnage que l'on suit ? D'un point de vue psychologique je n'ai pas eu le sentiment de suivre un personnage à part entière, plus une vague image d'une femme qui a perdu sa famille mais qui n'a pas d'identité propre, qui se définit toujours par le biais des autres : d'abord sa famille, Felix, puis Edward et enfin son café/librairie, mais le personnage de Diane, je n'ai jamais eu le sentiment de le découvrir.
Vous l'aurez donc compris, je n'ai pas trouvé Diane particulièrement attachante, évidemment on ressent de la compassion pour ce qu'elle a vécu, pour ce qu'elle subit au quotidien, mais c'est aussi difficile d'apprécier un personnage quand l'on ne perçoit pas réellement ses contours et quand celui-ci pleure la moitié - les trois-quarts ? - du temps.
Ce problème de psychologie des personnages n'est pas applicable à tous puisque j'ai beaucoup aimé les personnages seconds comme Felix même si je l'ai trouvé trop stéréotypé dans le genre "coureur de jupons gay" ce qui est dommage parce qu'il a un potentiel vraiment intéressant.
Non, c'est surtout Edward que j'ai aimé, j'ai trouvé qu'il était le personnage le plus élaboré, le plus abouti avec une réelle construction du personnage. Oui c'est vrai, son histoire peut paraître tirer par les cheveux, mais il n'empêche que ses réactions paraissent sincères et qu'il a l'air d'avoir été travaillé par l'auteure. En tout cas, j'ai cru sentir un réel cheminement dans la façon d'écrire ce personnage que ce soit dans son histoire passée et même dans celle que l'on suit avec sa femme, avec son métier de photographe.
Comme je le disais au début de mon article la sur-médiatisation de ce livre a sans doute joué dans mon appréciation, après tout, quand beaucoup de monde a adoré un bouquin, on est toujours un peu déçu de ne pas l'avoir autant aimé. Que voulez-vous, je m'attendais à mieux je ne vais pas mentir simplement pour être comme tout le monde. J'ai été déçu par la résolution, par le personnage de Diane et aussi par le style malheureusement. Sans m'attendre à quelque chose d'hyper transcendant, je n'ai pas été particulièrement transporté par l'écriture de l'auteure.
Pour dire la vérité, j'ai trouvé le style assez plat, le point positif est que ça se lit très vite, en une journée c'était plié, mais au-delà, j'ai tendance à préférer quand l'écriture est plus poétique, plus lyrique.
J'ai eu un gros problème avec les nombreuses répétitions. Je veux dire, répéter toutes les deux pages que Diane est déprimée, qu'elle fume cigarette sur cigarette et n'arrête pas de pleurer est une façon de dire les choses franchement et je préfère quand les choses sont dites de manière un peu plus subtile, plus métaphorique on va dire.
Sans être un fiasco total quand même, je m'attendais à mieux - beaucoup mieux - si bien que je ne comprends pas l'engouement qu'il y a eu pour ce livre, mais je suis contente de l'avoir lu, de m'être fait mon propre avis. Je tiens enfin à dire que ce n'est pas parce que je n'ai pas aimé que ça signifie que je ne le conseille pas, si je ne l'ai pas aimé, quelqu'un d'autre l'aimera, c'est évident. Il n'empêche également, malgré mon appréciation, que je salue le travail de l'auteure, comme toujours parce qu'il n'est jamais facile d'écrire un livre, parce qu'un auteur met une part de lui-même dans ses écrits et je ne veux pas donner l'impression de penser que c'est un travail aisé et rapide, parce que ce n'est pas le cas.
Pour finir, je me demande toujours si je vais me mettre à la lecture de la suite, La vie est facile, ne t'inquiète pas qui, si j'ai bien compris, vient en quelque sorte conclure l'histoire de Diane. J'aimerais bien le lire, surtout qu'il est tout aussi court, mais le seul truc qui me chiffonne vraiment c'est la couverture. Je n'ai pas envie d'acheter cette couverture avec une femme dessus que je trouve vraiment moche, surtout qu'elle ne va pas du tout avec l'édition collector de Pocket.
"Je
n’avais jamais habité seule, j’avais quitté la maison de mes
parents pour m’installer avec lui. J’avais peur de passer un
simple coup de téléphone pour demander un renseignement ou faire
une réclamation. Colin, lui, savait tout faire. Il fallait que je
l’imagine me guider pour tout préparer. J’allais le rendre fier
de moi. Si c’était une des dernières actions que je faisais avant
de m’enterrer, je prouverais à tous que j’étais capable d’aller
jusqu’au bout."
Agnès
Martin-Lugand, Les gens heureux lisent et boivent du café
À bientôt, en 2017 !
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