dimanche 5 avril 2020

Le Coin des libraires - La Solitude des nombres premiers de Paolo Giordano

Je ne sais plus depuis combien d’années ce livre est sur ma liste d’envies, au moins six, ou peut-être même sept ? Bref la sortie des éditions collectors de Noël c’est toujours l’occasion de découvrir de nouveaux titres, et de s’en procurer d’autres qu’on connaît mais qu’on n'a pas encore eu le temps de lire. 

C’est ce qui s’est passé pour La Solitude des nombres premiers de Paolo Giordano. Je voulais le lire mais ce n’était pas pressé, et puis cette merveilleuse édition est sortie. 

Écrire cet avis risque d’être délicat. 
Les raisons ? l’attraction / répulsion que le roman exerce sur moi depuis que j’ai tourné la dernière page. 



Commençons pas le commencement, c’est-à-dire par l’enfance d’Alice, fille unique, envoyée aux sports d’hiver alors qu’elle déteste le ski, qu’elle est toute seule et qu’elle a ce problème d’avoir toujours envie de faire pipi une fois partie sur les pistes. Cet élément en apparence anodin va régler toute sa vie future. 
À coté, il y a Mattia, frère jumeau de Michela, atteinte d’une maladie, du moins d’un retard entraînant l’énervement du frère qui se trouve être mis au ban à cause de sa soeur. Un jour ils sont invités à un anniversaire, mais Mattia ne veut pas se coltiner son empotée de soeur, il décide donc de la laisser seule dans le parc… 

On retrouve les deux protagonistes quelques années plus tard, au lycée, où ils se rencontreront et deviendront amis. 

Ça c’est le postulat de base. 

Les années passant on suit Mattia et Alice dans des moments charnières. On les quitte pendant cinq ans, pour les retrouver grandit, et toujours amis.

Mattia pensait qu’Alice et lui étaient deux nombres premiers jumeaux, isolés et perdus, proches mais pas assez pour se frôler vraiment. 

Ce livre m’a souvent fait penser à Un jour de David Nicholls, un roman où il est question de deux amis amoureux l’un de l’autre mais qui n’arrive pas à sauter le pas et qui préfère donc être malheureux de leur côté plutôt qu’heureux ensemble.
Pour moi La Solitude des nombres premiers c’est exactement ça. 

Le lecteur sait aussi bien que les personnages qu’ils s’aiment et pourtant il ne se passe rien… C’est le point négatif de ma lecture. J’avais peur que ce soit trop fleurs bleues en mode « on finit ensemble parce qu’on est des âmes soeurs » donc de ce point de vue là je n’ai rien à dire, mais je trouve que c’est un véritable gâchis — je ne suis jamais contente, je sais. 

Au-delà de ça j’ai adoré ma lecture. C’était hyper addictif, je lisais un chapitre j’avais directement envie d’en lire un autre. 
Mattie comme Alice sont des personnages que j’ai adorés, ils sont puissants, intéressants, recherchés. Je trouve que tout se passe dans les premiers chapitres. Si on ressent de l’empathie pour eux à ce moment, alors on en ressentira durant toute la lecture. 

Ils vivaient la lente et invisible compénétration de leurs univers, tels deux astres qui gravitent autour d’un axe commun, dans des orbites de plus en plus étroites, et dont le destin évident consiste à coalescer quelque part dans l’espace et le temps.

J’ai tellement accroché aux personnages et à leurs histoires que j’ai laissé de côté le roman pendant une semaine. Il me restait 80 pages mais je ne pouvais pas le finir. Je ne voulais pas les quitter, je ne voulais pas connaître la fin. Je voulais simplement rester dans cet entre-deux, celui où on a fait la découverte de vies et qu’on n’est pas encore prêt à connaître le fin mot. 

Mais il a bien fallu arriver au bout, accepter de refermer le livre et quitter cette histoire. 
J’aimerais une suite parce que le sentiment d’inachevé que je ressens refuse de s’en aller. Il n’y en aura pas, j’en ai bien conscience — elle aurait été écrite depuis bien longtemps sinon ! 
Alors j’ai lu les dernières pages et j’ai été déçue, déçue de voir la solitude triompher, de voir les non-dits gagner tellement de terrain qu’ils demeurent au centre de leur vie. 

Il y avait eu cet épisode, et il y en avait eu de nombreux autres, qu’elle avait oubliées, car l’amour de ceux que nous n’aimons pas se dépose à la surface de nos pensées et s’évapore en toute hâte.

La Solitude des nombres premiers est un très beau livre, bien construit, prenant dès la première page et aussi désespérément pessimiste. 

Mattie et Alice sont des personnages qui risquent de rester longtemps avec moi, des personnages pour lesquels j’éprouve une sympathie sans bornes, des personnages avec lesquels j’ai vibré, et appréhendé la fin. 





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