mercredi 6 mars 2019

Le Coin des libraires - #128 L'autre chambre de Diane Schmidt

Un court article, à l'image de L'autre chambre de Diane Schmidt, qui nous prouve que l'économie de mot peut faire les plus belles histoires. Mais avant ça, je ne peux pas écrire cet article sans d'abord remercier les éditions Envolume. Cette maison d'édition m'a contacté au sujet de ce livre, elle a été compréhensive concernant mon emploi du temps...
Bref, merci beaucoup François Sirot pour m'avoir permis de découvrir cet ouvrage !


Sans connaître le malheur, 
je ne suis pas heureuse. 
La vie glisse, sans larmes ni songes, 
comme une lente vague inutile et silencieuse. 

Le bonheur m’ennuie.
Parfois même jusqu’à me rendre triste. 
Comment font les gens pour avoir l’air 
d’aller bien ? 
Diane Schmidt, L'autre chambre


À noter : L'autre chambre sortira le 12 mars prochain


Une chambre. Deux femmes. Entre elles un homme… Deux héroïnes shakespeariennes au 21e siècle. Marine, 36 ans, cherche un homme pour sa première nuit. Ondine, 19 ans, danse dans un bar pour gagner sa vie.
Je suis devenue une femme à trente-six ans.
Avant je n’étais rien. Je n’avais pas envie.Je suis devenue une femme avec un vase,parce qu’il était à portée de main sur l’étagèrede ma chambre, et qu’il était joli.La première fois s’est faite sans lui.Je ne voulais pas qu’il parte à peine entré,à cause du fait que je n’étais pas encoreune femme, à l’âge où j’aurais dû l’être.Je n’ai rien senti. Ni douleur ni plaisir.Pas de quoi en faire un plat ou un poème.


La poésie n'est pas franchement pour moi (à l'exception de Baudelaire - comme tout le monde haha -, Musset et surtout Éluard), 
et pourtant l'auteure est parvenue à me faire entrer dans son histoire en un claquement de doigt. 

Poétique et crue à souhait voilà ce que c'est. Une histoire de deux femmes, très différentes et néanmoins fondamentalement les mêmes. Marine, Ondine. 
Ce sont les prénoms qui m'ont donné envie de prime abord. 
Ça, et les illustrations de la talentueuse Diane Schmidt. 
Ça donne un côté hypnotique, indistinct. 
Où commence Ondine et où se termine Marine ? 





La mer, l'image des sirènes, tout est présent pour métaphoriser la femme. 
Classique comme contemporaine. 
Ce qui les réunit, c'est leur sexe, autant que cet homme. 
Autant que leur solitude, leur douleur. 
J'ai été profondément touchée par leur détresse, 
et je considère que l'auteure est parvenue d'une main de maître à décrire leur faiblesse 
sans pour autant omettre l'importance des histoires de fesses. 

Je ne veux vous en dire plus, de peur de gâcher le plaisir, 
mais allez-y foncez découvrir cette histoire singulière 
et actuelle, qui vous fera compatir,
pour ces femmes en apparence sans avenir. 


Très sérieusement, cette histoire est magnifique, magnifiquement belle et dure. Diane Schmidt m'a donné envie de lire de la poésie, et il ne fait aucun doute que je suivrai ses futures publications.
Ce livre est un poème, poème qui me réconcilie avec la difficulté de lire de la poésie - chose que je n'aurais jamais cru possible !
L'autre chambre ne se lit pas, il se dévore. Il nous entraîne dans un monde en suspens où tout ce qu'il reste, c'est ses deux femmes. Deux femmes qui souffrent parce qu'elles ne souhaitent qu'être aimées. Deux femmes qui s'aiment l'une l'autre à défaut d'être aimée de l'homme. 
Une lecture enivrante où je me suis souvent retrouvée dans certains paragraphes.


Je ne parle pas, parce que je n’ai rien à dire. 
Je ne parle pas, parce que les mots silencieux 
de ma tête le sont aussi devenus 
de ma bouche. 
Qu’à force de ne plus les prononcer, 
je ne sais plus penser avec. 
Je ne parle pas, parce que je ne sais plus. 
Diane Schmidt, L'autre chambre.


Diane Schmidt écrit ce qu'Envolume qualifie de "roman", pour moi elle a écrit un poème, mieux, une chanson, dont chaque paragraphe figure à lui seul un moment hors du temps, un moment d'envoûtement où les mots nous enserrent et nous emprisonnent pour mieux nous tenir en otage jusqu''au dénouement. 
En un mot, ce texte est une beauté. 


L’absence est si présente, que je la sens 
parfois comme une personne réelle
se tenant tout près de moi. 
Le vide personnifié. Le seul à mes côtés, 
le seul à qui parler. 
Diane Schmidt, L'autre chambre.






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